C’est un fait, les musées, les lieux de patrimoine et plus largement les institutions culturelles n’ont pas un énorme succès parmi les jeunes, surtout chez les plus petits. Que ce soit raison de l’activité en soi – observer des objets anciens, venant du passé, inanimés – ou de la forme que prennent les visites – marcher pendant des heures pour ne voir que des objets mis sous vitrine sans forcément comprendre leur signification -, les musées sont en effet des lieux qui ne font pas participer les spectateurs et qui ne s’adaptent que très peu. A une époque où les différents secteurs culturels s’adaptent aux nouveaux consommateurs devenus totalement maîtres de leur consommation et de leurs activités (Netflix, Spotify etc), le modèle des visites muséales ne permet pas aux visiteurs de créer un lien d’intérêt avec les expositions et de s’impliquer réellement dans leur visite.
Aujourd’hui, l’un des principaux enjeux de ces institutions est de réconcilier la population – les jeunes plus particulièrement -, et la culture. En effet, des études ont montré que les jeunes restent encore assez éloignés de ce genre d’activités, qu’une grande majorité ne fréquente que très rarement les musées, et que ces derniers ne le font pas forcement en étant toujours très motivés. La part des 18-25 ans ne représentait que 15 % du public en 2014, et selon une étude Crédoc, 6 français sur 10 n’avaient visité aucun musée cette même année. Malgré la gratuité de tous les lieux culturels publiques pour les moins de 26 ans qui a été mise en place en 2009 par le Ministère de la culture, on observe encore une certaine réticence de leur part pour se rendre dans ces lieux.
Pour remédier à cela et les encourager à se rendre de plus en plus souvent au musée, voir des expositions et visiter des châteaux, des initiatives ont vu le jour afin de rendre ces visites plus attrayantes.
Le concept
Que l’on soit une adepte des musées ou non, une chose est sûre : comme partout où nous allons, nous avons notre téléphone portable avec nous. Les musées l’ont d’ailleurs bien compris et tentent depuis quelques années d’adapter leurs services aux nouveaux usages mobiles.
Pour faire simple, les technologies mobiles, que ce soit des tablettes, des téléphones portables ou autre, permettent aux visiteurs de se plonger dans des visites interactives, dans lesquelles ils deviennent acteurs et non plus seulement spectateurs. Ces visites d’un nouveau genre permettent ainsi d’impliquer le visiteur dans sa visite, dans ce qu’il voit, ce qui le rend donc possiblement plus intéressé par l’endroit où il est et par sa visite.
Un retour dans le passé grâce à la réalité augmentée
Une des principales technologies utilisée dans les lieux culturels est la réalité augmentée. A travers des supports mobiles (smartphones et les tablettes tactiles), les lieux culturels proposent ainsi des visites améliorées à travers la mise en mouvement d’objets exposés, ou encore un retour dans le temps. Pour mieux comprendre, prenons l’exemple du domaine du château de Chambord. Dès 2015 et pour fêter la commémoration des 500 ans du couronnement de François Ier, un nouvel outil de visite a été mis à disposition des visiteurs : « l’HistoPad Chambord ». Grace à une tablette numérique, le visiteur est alors invité à découvrir, grâce à la réalité augmentée, le Chambord d’il y a cinq siècles.
« L’innovation technologique se met au service du patrimoine qui se vit et se transmet comme un patrimoine vivant. L’HistoPad à Chambord s’inscrit dans une démarche générale d’adaptation aux usages et nouvelles pratiques des visiteurs ».
Une reconstitution virtuelle des pièces du château permet de voir le mobiliser originel, la grandeur des cheminées, et tout cela selon la volonté du visiteur. Cette nouvelle expérience étant totalement mobile, chacun est libre de découvrir le château à son rythme et comme il le souhaite. Tous les éléments de décors, mais également les murs et les escaliers en 3D et 2D viennent ainsi se superposer aux espaces réels à travers la tablette, pour une visite totalement immersive à 360 degrés, du sol au plafond.
Afin de satisfaire les plus petits, le domaine a décidé de miser également sur le jeu. Pour une expérience encore plus interactive et immersive, cet Histopad s’applique également à passionner ses visiteurs dès le plus jeune âge : pour une expérience ludique et adaptée aux enfants, l’Histopad propose une visite sous forme d’une chasse au trésor au sein des pièces du château. En ouvrant les tiroirs, en soulevant la vaisselle ou en écartant les tapisseries, les enfants doivent trouver des pièces d’or cachées dans les espaces reconstitués virtuellement.
C’est d’ailleurs cette même tablette, l’Histopad, qui a été introduite dans le Palais des Papes et qui permet donc désormais à ses visiteurs de profiter de leur visite d’une autre manière. Fonctionnant sur le même principe que celle du château de Chambord, cette installation est à ce jour la plus grande installation au monde de réalité augmentée dans un lieu culturel.
Avignon utilise également cette technologie révolutionnaire pour faire renaitre son célèbre pont, célèbre pour la comptine qui lui est consacrée. Mais comment a t-il été détruit ? Pourquoi ? A quoi ressemblait-il avant ? C’est à toutes ces questions que l’application Avignon 3D a cherché à répondre. Disponible sur l’Apple Store et Gloogle Play, elle permet aux visiteurs d’utiliser la réalité augmentée sur leur mobile, afin de voir le pont reconstituer à travers leur écran.
Le créateur de cette tablette, la start-up française Histovery crée en 2014, permet donc aux lieux culturels de renouveler leur offre afin que celle-ci soit en adéquation avec l’évolution des technologies et des usages.
« La réalité augmentée est l’avenir des musées », a souligné Google
En France, les initiatives de ce type se sont plutôt concentrées sur les visites de lieux de patrimoine comme le château de Guillaume de conquérant ou encore la Conciergerie. Mais à l’extérieur de nos frontières, d’autres projets ont pu voir le jour, cette fois ci dans des musées.
Le Museum of Moder Art de New York a proposé une visite totalement inédite, et basée à 100 % sur les technologies mobiles. En 2010, un projet a utilisé la réalité augmentée afin de faire vivre aux seuls détenteurs de smartphones qui avaient téléchargé l’application, une exposition totalement virtuelle, invisible à l’œil nu, et dispersée sur les 6 étages du célèbre musée. Fondant complètement cette expérience sur la puissance des technologies et de l’attrait que cela pourrait créer chez les visiteurs, ils ont ainsi permis aux visiteurs de découvrir des œuvres inédites à travers l’écran de leur téléphone.
On ne peut pas reconstituer d’anciens objets, c’est justement là tout le but des musées, de les exposer tels qu’ils sont aujourd’hui. Mais nous sommes aujourd’hui capables de voir virtuellement comment ces objets étaient au départ, lors de leur création. Le mobile ne remplace donc pas les expositions, mais il vient en complément afin d’enrichir l’expérience des visiteurs et leur apporter des connaissances supplémentaires.
En 2017, le Detroit Institute of Arts, un musée américain particulièrement connu pour sa collection archéologique, a dévoilé un projet baptisé Lumin, mêlant réalité augmentée et mapping 3D. Prêtant des smartphones équipés de la technologie de réalité augmentée Tango développée par Google, le musée a permis à ses visiteurs de visualiser une vue aux rayons X du squelette d’une momie, alors que celle-ci était placée à l’intérieur d’un sarcophage. Ils pouvaient également découvrir les vives couleurs originelles de bas-reliefs venant d’un palais assyrien, ainsi que se promener dans une reconstitution des portes de l’ancienne Babylone simplement en ciblant avec leur smartphone un mur du musée où sont exposés quelques fragments de la Porte d’Ishtar.
La réalité augmentée, en plus de faire participer plus activement les visiteurs dans leur visite, leur apporte une valeur ajoutée non négligeable. Plus que de simples gadgets mobiles, ces nouveaux outils permettent aux lieux de patrimoine, aux musées et aux institutions culturelles d’évoluer avec leur temps, pour continuer à être attractif et assurer leur pérennité.
Les musées l’ont donc bien compris, à l’ère du numérique et du smartphone, il faut s’adapter aux nouvelles attentes et aux nouvelles consommations des visiteurs. L’avènement des technologies mobiles et des capacités, aptitudes et possibilités qu’elles suggèrent obligent les musées à revoir leur offre afin de maintenir une certaine attractivité chez ces nouveaux citoyens connectés
Sources :
- http://www.observationsociete.fr/categories-sociales/conditions-de-vie/qui-visite-les-musees.html
- https://histovery.com/
- http://www.club-innovation-culture.fr/avec-un-film-en-3d-et-une-application-en-realite-augmentee-avignon-reconstitue-son-pont/
- https://android-developers.googleblog.com/2017/08/arcore-augmented-reality-at-android.html)
Depuis maintenant de nombreuses années il est possible de faire des visites de musées armés d’audioguides afin d’avoir un complément d’information sur certaines œuvres : depuis peu, certaines applications sur smartphones permettent aussi cela, comme par exemple au musée Choco-Story de Paris. Cependant, je n’avais pas encore entendu parler de visites interactives via des supports mobiles. En effet, comme l’explique très bien l’article, le fait de faire revivre les lieux et les œuvres exposés, de leur redonner leur éclat d’origine, et ce même si ce n’est qu’à travers un écran, peut permettre d’attirer des personnes auxquelles de vieux objets ne parlent pas forcément. Voir l’avant/après, replonger dans l’ambiance du lieu peut en effet créer un nouvel intérêt… même si le biais de l’écran risque de modifier la visite, d’attirer la concentration du visiteur davantage sur la tablette et ses attraits que sur les œuvres et vestiges originaux. Dans une idée pas si lointaine que celle de la visite agrémentée par des supports sur mobiles, on pourrait aussi évoquer le Musée Archéologique Virtuel d’Herculanum près de Naples en Italie. Ce musée est construit entre les villes d’Herculanum et de Pompéi ravagées par le Vésuve et est un complément interactif à la visite. En effet, lorsque l’on visite les sites des différentes cités, on peut voir de nombreux vestiges, admirer des mosaïques, des poteries mais aussi rencontrer les empreintes de certains corps, le tout sans énormément d’explications, ce qui peut rendre la visite rapidement répétitive. Situé à côté de ces sites, le « Museo Archeologico Virtuale » permet de leur redonner leur lustre d’antan, tout en se plaçant dans la peau d’apprentis archéologues. Grâce au développement de la technologie, ce musée permet une visite en 4D des sites : des décors sont reconstitués sur les murs grâce à des projections qui donnent aux visiteurs l’impression d’être dans la maison qu’ils visitent, des sons sont diffusés afin d’être plongés dans l’ambiance, certaines salles permettent de sentir certaines odeurs… mais le vrai plus de ce musée est qu’il permet aux visiteurs d’avoir l’impression de prendre part aux fouilles. En effet, dans certaines salles le visiteur peut passer sa main sur des mosaïques au sol ou des fresques murales afin d’enlever la poussière et les marques du temps et leur redonner leur aspect d’origine. Bien entendu tout cela est virtuel, mais le visiteur est impliqué dans sa visite, bien plus qu’il ne l’est sur les sites de fouilles à proprement parler (vous pouvez trouver des compléments d’informations sur cet article : https://olimetnunc.hypotheses.org/387 mais aussi sur le site du musée : https://www.museomav.it/ ).
Ainsi donc, il y a de nombreux moyens de rendre les musées plus attractifs, l’important étant de trouver le moyen adéquat pour chacun. Le musée du Louvre permet par exemple à ses visiteurs de participer à un jeu de piste qui leur permet de découvrir les œuvres qu’il propose, car il n’a pas besoin de réalité virtuelle tant les œuvres exposées sont en bon état.